prévisions des vagues: de l'océan aux grands lacs avec l'ouragan Sandy

tandis que l'oeil de Sandy atteignait la côte Est des Etats-Unis le October 29, les Grands Lacs ont connu une de leur nuits les plus agités. La hauteur des vagues à atteint 6,6 m au sud du Lac Michigan, comme le montre ces mesures faites par une bouée. Cet évènement extrême a été bien annoncé par le nouveau système de prévision. Développé par le service météorologique américain, à partir des resultats scientifiques du SHOM et de l'Ifremer, le nouveau système devrait définitivement remplacer l'ancien dans les mois qui viennent.

De la recherche à l'application, cela peut prendre du temps. Mais, pour la prévision des vagues, tout s'accélère. Avec le nouveau système mis en oeuvre pour les Grands Lacs américains, c'est la première fois que la prévision opérationnelle des vagues utilise un calcul du nombre de vagues qui déferlent pour en déduire la perte d'énergie des vagues. Cette approche a été developpée par Jean-François Filipot qui a soutenu sa thèse à l'Université de Bretagne Occidentale en 2010. C'est une étape importante pour les méthodes de prévision des vagues, qui ouvre aussi de nouvelles applications pour la sécurité de la navigation, l'exploitation des énergies marines ou l'étude des effets des vagues dans le "système terre": échanges gazeux, production d'embruns, interprétation d'autres mesures faites par satellite ...

Avant d'en arriver là, il a fallu convaincre. C'est d'abord la DGA qui a financé des d'études amont sur la modélisation des vagues, regroupant le SHOM, Météo-France et l'Ifremer autour d'un même projet. L'analyse des mesures radar faites entre 2003 et 2008 par le satellite Envisat a permis de comprendre la dissipation de la houle et de compléter l'effet du déferlement. Ainsi, depuis 2007, de nouvelles méthodes de prévision des vagues sont régulièrement testées et validées dans le cadre du système "Prévimer". Les premiers résultats positifs ont été adaptés par Météo-France, conduisant à de nettes améliorations des prévisions avec la mise en service de nouveaux modèles numériques en 2010. Depuis lors, le soutien apporté par la marine américaine à un partenariat international permet d'intégrer plus rapidement les travaux de collègues australiens et américains avec le travail réalisé à l'Ifremer, et de traduire les observations et théories en méthodes de calcul. Depuis deux ans, l'Ifremer contribue directement au logiciel de prévision de la NOAA, avec une transition très rapide vers les applications. Par exemple, une trouvaille faite en février a permis de réduire de 30% les erreurs de prévision autour de Tahiti. Elle a pu être testée dans Prévimer le jour même, et a fait partie du nouveau système opérationnel de la NOAA en mai. La nouvelle utilisation dans les grands lacs permet de vérifier le comportement du modèle en bassin fermé, en absence de houles océaniques. Utiliser les mêmes outils partout permet d'augmenter leur robustesse. Ce qui fonctionne en rade de Brest doit pouvoir marcher dans les grands lacs et inversement. Outre les services météorologiques français et américains et la Marine Nationale, ce sont aussi les chercheurs et PME qui en bénéficient directement: soit parce qu'ils utilisent le Pole de Calcul Intensif pour la Mer , soit par l'accès à la base de données publique IOWAGA .

Les évolutions futures de la modélisation des vagues prennent désormais en compte un ensemble d'observations beaucoup plus vaste: après la prévision des hauteurs, période et directions des vagues les plus grandes, nous cherchons donc a prévoir quelles sont les vagues qui déferlent, quelle est la hauteur des vagues les plus courtes, quelles sont les hauteurs des vagues dans toutes les directions... Cet effort de développement est soutenu par le Conseil Européen de la Recherche qui finance le projet "Etude Intégrée des vagues" (IOWAGA) et le Labex Mer . Un des défis les plus important est l'estimation de la rugosité de la surface pour les vents, ce qui est très important pour prévoir les phénomènes de surcotes lors de tempêtes comme Xynthia. Ce travail est complété par les études réalisées au SHOM et à l'IUEM sur l'impact direct des vagues sur les surcotes en milieu littoral, avec une importante campagne de mesure actuellement en cours en mer d'Iroise. Les vagues sont un élément essentiel de l'interface air-mer, qu'il convient d'étudier de façon intégrée en combinant océanographie et météorologie, avec des techniques d'observation qui vont de la sismologie à la télédétection spatiale, sans oublier la mesure in situ.